Envisager la mort, la sienne, celle des autres, c’est se confronter au vertige de l’absence. A la peur de l’invisible. Certains ont pourtant choisi de prendre la mort à bras le corps. Peut-être parce qu’au fond, dans la mort, c’est un peu des vivants qu’il s’agit.
Quand Inès perd son compagnon en 2009, elle cherche « des réponses ». Aujourd’hui, comme des milliers de Français chaque année, la sexagénaire s’en remet à un « médium spirite », c’est-à-dire à un voyant spécialiste de la communication avec l’au-delà. C’est dans le salon parisien d’Henry Vignaud, star du Guide de la voyance, que la Grenobloise a choisi d’entrer en contact avec l’âme de son mari. Les dix-huit mois d’attente pour obtenir un rendez-vous ne l’ont pas découragée.
Regardez la consultation d’Inès
Son deuil, Inès aurait aussi pu le confier à Claire Thomas. Cette femme de trente-cinq ans est médium et magnétiseuse. Persuadée de détenir un don de médiumnité, elle a quitté son poste dans la communication il y a quatre ans pour lancer son cabinet dans le 16e arrondissement de Paris. « Certaines personnes ont du mal à faire le deuil. Elles attendent d’être rassurées, de savoir que la personne est arrivée à bon port, là-haut », résume-t-elle, tout en restant vigilante sur les promesses faites à ses clients. « Quand je n’arrive pas à parler au défunt, je leur conseille un confrère. »
Ne pas revenir plus d’une fois par an, voilà la consigne de la plupart des médiums à leurs clients. Un moyen de démasquer les charlatans dans un marché du deuil très lucratif. L’heure de consultation coûte jusqu’à 150 euros. Chers disparus…
Stéphane Allix n’a pas vu de médium après le décès de son petit frère, survenu il y a quinze ans dans un accident de voiture. Selon ce journaliste, la solution ne se trouve pas dans une boule de cristal. Lui s’évertue à fournir la preuve de l’après-vie de manière rationnelle et objective. Une quête qui l’obsède, jusqu’à fonder en 2007 l’Institut de recherche sur les expériences extraordinaires (Inrees).
« On n’affronte jamais la question de la finitude et pourtant on vit dans un corps qui va finir, explique-t-il. C’est comme si la dimension la plus importante de notre existence était maintenue à l’écart. L’idée qu’après la mort tout s’arrête a pénétré la société. Mais en réalité, il n’y a aucune preuve scientifique. »
Inès, elle, repart de la consultation apaisée. Sans preuve scientifique, mais qu’importe. A ses yeux, l’essentiel est ailleurs : elle a passé une heure de plus avec son compagnon.
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